
Cinq ans déjà
Luc Dellisse
Pour
Jacques De Decker

J’aimais Jacques d’un amour qui allait bien au-delà de son œuvre et de son activité culturelle. Je l’aimais dans sa personne, dans sa voix, dans son sourire tendre et pensif, dans ses passions, dans ses lubies parfois, dans sa générosité: il répandait son temps et ses idées, comme puisant dans un trésor inépuisable, qui n’est toujours pas épuisé, cinq ans après sa mort. Son esprit, son point de vue mobile sur les choses du monde, grandes ou petites, sa voix mesurée, douce, ferme, me sont présents, presque à volonté. Il était la présence incarnée. Et je revois souvent, et je ressens souvent, sa personne vivante, pesant de tout son poids terrestre. Et il continue à m’accompagner sur le trottoir où nous allions. Et je le retrouverai encore, demain, tout à l’heure peut-être, au café de l’Atelier, où nous faisions halte, de longues heures, pour parler, échanger, soutenir ou refuser les ordres du ciel. Ce café n’existe plus, démonté par des mains invisibles, mais bien entendu, il demeure intact dans un lieu hors du temps où je peux me rendre en confiance : Jacques est là.
© Aude Boissaye