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Flèche astrale en faveur du Totem

Anatole Atlas

Pour 

Jacques De Decker

Le Totem est un mât central dont les figures symboliques, sur plusieurs niveaux, traduisent les multiples relations humaines avec le Grand Tout. Tellurique et cosmique, ce mât reliant terre et ciel parle. Son langage traverse tous les étages, dont chacun dispose de son propre idiome, qu’il revient au Totem de réunir dans une unité supérieure de signification.

Tel était Jacques De Decker, tel il demeure au-delà de son alchimique transmutation.

L’axe central reliant les pôles de l’univers n’assure l’unité de la communauté que parce qu’il en parle toutes les langues, dont il est de l’une à l’autre en son être profond l’interprète — le suprême herméneute. Il est Hermès, messager aux sandales ailées, dans l’immobile représentation d’un voyage infini entre nature et culture, matière et esprit, biosphère et psychosphère. Mais aussi entre les différentes composantes sociales de la communauté, qui sans mât central s’effondrerait tel un chapiteau de cirque. Ainsi son message est-il un appel à responsabilité, c’est-à-dire à l’art de répondre. As, roi, dame, valet comme roi, dame, fou, cavalier, tour sont avec les signes du tarot des métaphores immémoriales de l’humanité (si elle ne veut pas être réduite à la figure du chiffre ou du pion) dont un être comme Jacques nous invite à penser le sens, lui qui sériait ses activités de traducteur et de critique, d’homme de théâtre et de romancier selon les symboliques du cœur et du carreau, du trèfle et du pique. Mais aussi du Joker. Lequel peut bien, sur l’échiquier, faire surgir une verticale du fou…

C’est inspiré par cette leçon que, ce ler janvier, s’exécutera un plongeon. Dans un lac de la Région bruxelloise, une flèche incendiaire franchira le miroir des eaux vu comme une table d’émeraude liquide, en hommage au Totem. Il s’agira de l’acte propitiatoire accompli par un Fou en présence de trois Dames. Son sens est esthétique, éthique et politique. Le Totem et le Tabou ne s’accordaient-ils pas sur un progrès de l’Histoire qui culmina fin des années 60, quand frémirent des ailes sur les omoplates atrophiées de l’humanité? Un rabotage de ces ailes serait l’œuvre du dernier demi-siècle.

Après la pantomime du mur de Berlin, le nomadisme deviendrait l’apanage des affairistes et le destin de l’immense nation des dépossédés, sous le regard attristé du messager aux sandales ailées. Les dragons s’affubleraient du masque de l’archange dans leurs jets privés. Si le vagabond sans un rond fut hier (Stephen Dedalus!) une figure héroïque de la civilisation, comment ne pas voir l’humanité suppliciée dans une chambre à gaz de basse intensité? Ce plongeon du 1er janvier dans un volcan glacé liquide sera celui d’une flèche de lave astrale.

En faveur d’une humanité totémisée.

 

TABOU

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