Un au-revoir
Alain De Grauw
Pour
Henri Vernes
Mon cher Charlie,
C’est la première et dernière fois, en quinze ans d’amitié, que je t’appelle par ton vrai prénom, ce doit être une circonstance exceptionnelle. Je ne suis pas présent aujourd’hui, j’ai donc confié la lourde tâche à notre amie, la belle Aurélie, de lire ce petit message.
La dernière fois que je t’ai vu, il y a deux semaines exactement, je t’ai dit “Je pars en vacances, fais attention à toi, pas de bêtises, on se revoit dans quinze jours.” C’était un au revoir.
Cette cérémonie, aujourd’hui, ressemble méchamment à un adieu. Tu me connais, j’ai horreur de ce genre de célébration et plus encore des adieux, c’est trop définitif.
La dernière image que j’ai de toi: tu es assis dans ton divan, on se tient les mains et on se dit à bientôt, c ’est cette image que je veux garder à jamais et pas celle de quatre planches entre lesquelles ton corps repose ou d’une urne contenant tes cendres.
Tu n’es plus là physiquement mais ton esprit, lui, est toujours bien vivant et le sera à jamais.
Tu es vivant dans la mémoire et le cœur de tous les gens que tu as côtoyés, de tous ceux dont tu as suscité les vocations, de tous les lecteurs qui, un jour, ont ouvert un de tes romans, de ceux qui en ouvriront un et que tu emporteras aux quatre coins de la terre vivre des aventures palpitantes.
Voilà pourquoi je ne suis pas là aujourd’hui: tu n’es pas parti, tu te prépares pour un long voyage.
Le Fulmar est à quai, Mado et Dinah, tes deux amours, Valérie, Mamy Lucile, Papy Jean-Baptiste, mais aussi Jean, William, Bib, César sont déjà à bord, c’est toi le commandant et ils t’attendent pour appareiller.
Alors, bon vent, mon vieil ami, nous nous reverrons un jour ou l’autre.
Je t’embrasse,
Alain.